Le président de la section locale de l’Union Bretonne des Combattants (UBC), Antonin Flécher, poursuit inlassablement ses recherches sur Bannalec et les Bannalécois au cours de la Seconde Guerre mondiale. Après un patient travail pour retrouver des témoins des faits (même en dehors de nos frontières comme Primo Ruffoni), il a réussi à reconstituer l’historique du dépôt de munitions de Kerlagadic.

recherche Antonin Flécher

Main-d’oeuvre locale

« L’histoire de ce dépôt de munitions est liée à l’arrivée des troupes allemandes à Lorient, le 21 juin 1940 et leur installation dans le port, comme base sous-marine stratégique sur l’Atlantique. Au début de l’année 1942, la Royal Air Force anglaise lance ses 1ers raids pour détruire les pôles stratégiques allemands, dont l’arsenal militaire et la base de Kéroman, ce qui oblige les nazis à délocaliser une partie de leurs munitions », raconte Antonin.

C’est ainsi que le bois de Kerlagadic à Bannalec et la forêt de Coatloch à Scaër sont retenus par l’état-major allemand. « Ces sites possédaient de nombreux atouts : un camouflage naturel, notamment pour éviter les frappes aériennes, une gare ferroviaire à proximité et des axes de communication en bon état pour acheminer le matériel ».

Au printemps 1942, les Allemands mettent en place le périmètre de 30 ha autour de Kerlagadic, nécessaire pour stocker les munitions, avec une clôture de barbelés et des points d’accès sous bonne garde : l’entrée du camp se trouve au manoir de Kerlagadic et sur le chemin de Sainte-Anne, où les habitants doivent montrer leur laisser-passer pour rentrer chez eux. Une main-d’oeuvre locale est réquisitionnée pour creuser une vingtaine de soutes de stockage, avec coffrage en bois et toiture en tôle épaisse.

Un témoin, Jean Nabat expliquait à Antonin : « Notre famille possédait une ferme à Toul-an-Coat Bihan, à l’intérieur de la zone du dépôt. En 1942, les Allemands ont installé un poste de garde dans la ferme, occupant une grande chambre à l’étage. Nous avons cohabité pendant plusieurs mois (jusqu’en mars avril 1943) avec un corps de garde constitué de 4 soldats et un sergent. Ensuite, nous avons été expulsés de chez nous et la mairie nous a relogés dans une partie des bâtiments du château de Quimerc’h ». À l’époque, le château était aussi occupé par des réfugiés de Lorient, chassés par les bombardements.

Deux fusées vertes

Une trentaine de soldats allemands sont affectés à ce dépôt, des corps de garde, des artificiers de la Wehrmacht, 13 Italiens antifascistes prisonniers et deux Algériens de l’armée française (également prisonniers) : Djellali Matra et DM Hanouti. Un sergent allemand, surnommé Arthur dirigeait les rotations hippomobiles (charrette tirée par des chevaux), de la gare vers le dépôt. C’est d’ailleurs en s’attaquant à des wagons de munitions, que Pierre Pendélio est blessé puis fait prisonnier dans la nuit du 10 au 11 novembre 1943, ce qui entraîne ensuite, l’arrestation des frères Le Gac, de Michel Yvonnou, Eugène Cadic et Eugène Lorec (« les 6 fusillés de Bannalec »).

À partir de juin 1944, les Allemands commencent à transiter les munitions hors de Bannalec par le train. Mais l’état-major allemand avec le général Fahrmbacher, craignant sans doute pour ses convois et disposant de peu de temps, décide de détruire une partie des munitions sur place. Le matin du 4 août, les Italiens s’évadent et se retrouvent à la ferme Porodo, à Coatéréac. Lundi 7 août 1944, à 6 h 30, le dépôt de munitions explose en plusieurs étapes, sans victime dans la population, mais avec de gros dégâts matériels. Après l’attaque de la draisine à la gare, les soldats allemands quittent la commune. À la fin de la guerre, les destructions de munitions ont lieu tous les jours, sauf le dimanche : le danger était signalé à la population par deux fusées vertes.

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